VOUS AVEZ DIT PROVOCATEUR !

« Ce qui compte dans un scénario, c’est son impact. Ce qui explique peut‑être que j’aime les films qui me provoquent et que je fais des films qui provoquent le spectateur. » Paul Schrader, scénariste et réalisateur

Lors de son précédent cycle, Culture et Cinéma a revisité la folie du Nouvel Hollywood. Cette vague de jeunes cinéastes qui, du milieu des années 60 jusqu’à la fin des années 70, a littéralement pris le pouvoir des mains de studios dépassés par cette époque chaotique. Rarement un courant cinématographique n’aura été aussi iconoclaste… Mais aussi court ! Une quinzaine d’années, c’est le temps qu’il a fallu à certains cinéastes du Nouvel Hollywood pour se fracasser sur l’autel de leur propre radicalité : Francis Ford Coppola et son équipe ont failli ne pas survivre au tournage d’Apocalypse Now, William Friedkin côtoie la folie en filmant The Sorcerer et Michael Cimino porte le dernier clou au cercueil avec le fiasco monumental de La Porte du Paradis.

Les plus jeunes talents du Nouvel Hollywood ne suivront pas ce chemin. Ils s’appellent Georges Lucas ou encore Steven Spielberg. Leur talent et leur vision de réalisateur ne seront pas mis au service de films artistiquement radicaux, mais de spectacles hors norme. Porté par le mastodonte Star Wars, ils font entrer Hollywood dans une phase qui fait encore autorité aujourd’hui : le cinéma de divertissement. Désormais, les films devront être spectaculaires, novateurs mais aussi outrancièrement apaisés…

Ou presque…

Aux quatre coins du monde, des cinéastes ont juré que le cinéma ne négociera jamais son pouvoir subversif, critique ou politique. Ils sont américains, européens, japonais… Ils ne lâcheront rien, même quand ils collaborent parfois avec des grands studios. Leurs noms : Paul Schrader, Paul Verhoeven, David Cronenberg, Nagisa Ōshima, Werner Herzog.

Paul Schrader est un cinéaste unique. Il appartient à la génération dorée du Nouvel Hollywood. D’abord scénariste, il secoue la planète cinéma en signant le script de Taxi Driver de Martin Scorcese. Une plongée inoubliable et suffocante dans le New York des années 70 qui révéla également Robert De Niro. Tout en mettant sa plume au service de Scorcese, Brian De Palma ou encore Peter Weir, Schrader devient réalisateur d’une œuvre prolifique mettant en avant des personnages aux prises avec les dilemmes de leur propre existence comme Hardcore, American Gigolo avec Richard Gere ou encore Mishima.

Le canadien David Cronenberg réalise des films de genre où l’horreur émerge de la matière organique. D’abord cantonné à la série B, il s’installe à Hollywood dans les années 80 pour construire une œuvre qui dépasse le simple cadre du film fantastique. Célébré au Festival de Cannes au point d’en avoir été le président du jury en 1999, ses films n’ont de cesse de questionner nos rapports (monstrueux) au corps humain et social, ainsi que notre dépendance à la technologie.

Le voyage à Hollywood, le réalisateur néerlandais Paul Verhoeven l’a expérimenté d’une autre manière. Ses films d’auteur aux Pays-Bas sont tellement radicaux qu’il fuit son propre pays, lassé par les scandales à répétition. S’inscrivant dans les demandes du « marché » américain, la science-fiction avec Robocop ou le thriller avec Basic Instinct, Verhoeven va y insuffler sa radicalité afin que ces films de commandes deviennent siens. Et, à chaque fois, les mêmes tabous auscultés : le sexe, la violence, la religion.

Le japonais Nagisa Ōshima est le chef de file de ce que l’on a appelé (souvent abusivement) « la nouvelle vague japonaise » des années 60. Ōshima refuse la censure des studios et met en place des circuits totalement indépendants pour réaliser ses films traitant librement de sujets politiques ou de la libération des mœurs de la jeune génération. Il devient célèbre avec l’Empire des sens, une œuvre sulfureuse qui l’obligera à quitter le Japon pendant deux décennies.

Enfin, l’allemand Werner Herzog confronte la folie humaine aux forces de la nature, quitte à ce que le plateau de tournage soit le théâtre même de ce combat délirant. Comme dans Fitzcarraldo, où il impose qu’un bateau de 300 tonnes soit hissé au-dessus d’une colline sans effets spéciaux. François Truffaut disait de lui qu’il était « le réalisateur le plus important au monde ». Herzog est également un réalisateur de documentaires prestigieux, comme Grizzly Man, et vient de publier ses mémoires.

Le cycle « Les Provocateurs du Cinéma » vous invite à vous (re)plonger dans ces classiques radicaux, iconoclastes et par-dessus tout intégralement dévoués au grand cinéma !

Liste des cinéastes du cycle :

  • Paul Schrader
  • David Cronenberg
  • Paul Verhoeven
  • Nagisa Ōshima
  • Werner Herzog
  • Paul Schrader

Pour initier ce cycle, nous vous proposons un film de David Cronenberg Les crimes du futur.